Dans les Montagnes bleues, en Australie (photo prise par un inconnu)

 

En 2010-2011, tu es parti faire un tour du monde. Quelles étaient tes motivations ?

J’en avais envie. J’étais las de n’avoir que deux semaines de vacances pour voyager chaque année, j’avais envie de partir plus longtemps. J’avais le goût de connaître davantage le monde, de vivre un maximum d’expériences différentes. Je voulais un grand défi. J’ai donc préparé le projet et je l’ai réalisé. Je n’avais pas de responsabilité particulière, j’avais la santé, mais surtout, j’avais la motivation. Amasser l’argent n’était qu’une question de temps et de discipline. C’était une étape facile, à vrai dire. Le plus dur, c’était de prendre la décision de partir. Mais une fois la date de départ déterminée, je n’ai eu qu’à m’occuper des préparatifs, une étape à la fois.

Dans quelles conditions voyageais-tu ?

Je voyageais avec un sac à dos et je m’étais fixé un budget quotidien de 30 dollars canadiens. Il pouvait cependant varier d’une journée à l’autre, en fonction de ce que je faisais. Je dormais dans les auberges, souvent dans les dortoirs, car ils sont des lieux propices pour rencontrer d’autres voyageurs. Il m’arrivait parfois de louer une chambre, quand j’avais envie d’un peu de calme. Je n’allais pratiquement jamais dans les hôtels, je les trouve froids, impersonnels. J’ai aussi fait du CouchSurfing à plusieurs reprises, surtout en Europe.
Côté nourriture, je mangeais dans la rue aussi souvent que possible, pas seulement parce que c’était plus économique, mais surtout parce que c’était délicieux. La Thaïlande est d’ailleurs un paradis pour la nourriture de rue. Sinon, j’aimais beaucoup aller dans les petits restaurants familiaux; les quelques plats sur la carte y sont habituellement maîtrisés et savoureux.
Pour les transports, je préférais prendre le taxi, le bus ou le bateau, plutôt que l’avion. Je crois que le rythme plus lent de ces moyens de transport permet de mieux apprécier le pays visité.
J’ai bien sûr visité plusieurs attractions célèbres, mais j’ai surtout passé du temps à rencontrer des gens, autant d’autres voyageurs que des « locaux ». J’aimais beaucoup m’asseoir sur une terrasse, boire un verre et regarder les gens vaquer à leurs occupations. Enfin, j’ai suivi plusieurs cours: plongée sous-marine, escalade, muay thaï, surf, cuisine, etc. J’ai même donné quelques cours d’anglais, dans plusieurs pays.

Leçon de surf à Kuta (Bali, Indonésie – photo prise par Mélanie Arès)

 

Quels ont été tes coups de cœur ?

Le Sri Lanka et le Cambodge. Deux pays aux peuples tellement accueillants, malgré leur passé douloureux. J’y ai fait des rencontres extraordinaires. Les Sri Lankais avaient l’air très heureux de rencontrer des voyageurs, j’ai senti une réelle curiosité de leur part envers moi. En plus, le pays possède une riche histoire, des attractions impressionnantes (par exemple, Sigirîya et les ruines de Polonnaruwa) et le coût de la vie y est assez bas. En outre, la région du Hill Country est l’une des plus belles que j’ai visitées au cours de mes voyages. Le vert éclatant des théiers recouvrait les pentes des montagnes et des collines, c’était magnifique.

Le Cambodge ne possède que peu de paysages remarquables (pour ce que j’en ai vu), mais les gens étaient très charmants. En plus, il y avait bien des choses à faire, à voir: les temples d’Angkor bien sûr (oui, ils valent la peine, ils sont incroyables), mais aussi la région de Battambang (le train de bambou!), Phnom Penh et son histoire tourmentée, le bokator…

J’ai aussi beaucoup aimé la Thaïlande, le Laos, l’Indonésie, la Malaisie, les îles Fidji et la Belgique.

Des déceptions ?

Le Vietnam. Le pays est magnifique, avec des endroits magiques comme la vallée de Sa Pa, mais c’est là-bas que j’ai rencontré les gens les plus rudes de mon voyage (en particulier à Hanoi). J’y ai aussi vécu le moment le plus dangereux de mon tour du monde, quand j’ai failli me battre avec un chauffeur de taxi armé d’un bâton avec des lames. De plus, les arnaques sont fréquentes, notamment en ce qui a trait aux excursions dans la baie de Halong. Malgré tout, j’ai vécu des moments merveilleux au Vietnam et je suis heureux d’y avoir été.

Comment s’est passé ton retour ?

Les premières semaines étaient euphoriques, avec les retrouvailles, la recherche d’un appartement et d’un emploi. Ces recherches se sont très bien déroulées, en fait. Un appel à tous sur Facebook et deux jours plus tard, j’avais trouvé un appartement. J’avais en outre conservé des liens avec mon ancien employeur, alors j’ai pu reprendre mon ancien emploi peu après mon retour. Ces aspects ont donc été rapidement réglés, à mon grand soulagement.

Puis la routine est revenue et j’ai alors ressenti une certaine mélancolie. L’hiver a été plutôt difficile, d’autant plus que, l’année précédente, à la même époque, j’avais passé plusieurs mois dans la chaleur de l’Asie. Ce n’est que lorsque j’ai recommencé à élaborer de nouveaux projets que les choses se sont replacées un peu. Repartir en voyage devrait aussi m’aider à tourner définitivement la page sur ce chapitre.

A ton avis, quelles qualités faut-il avoir pour partir voyager autour du monde seul comme tu l’as fait ?

La flexibilité, l’ouverture d’esprit, la débrouillardise, la sociabilité, la patience, la curiosité, l’humilité.

Aux chutes de Kuang Si, Laos (photo prise par Stéphane)

Que te manque-t-il du Québec lorsque tu es en voyage ?

Ma famille et mes ami-es. Mais un service comme Skype permet de rester en contact avec ses proches, en autant qu’on tienne compte des fuseaux horaires. J’aime également envoyer des cartes postales. C’est surprenant de constater à quel point les gens aiment encore en recevoir.

Quand je pars un bon moment, je m’ennuie aussi de la poutine, ce plat québécois parfois mal-aimé. Quand je suis dans un pays où on l’on peut trouver du fromage, j’essaie de m’en préparer. Sinon, j’essaie de trouver des restaurants qui en servent. Or plusieurs restaurants en vendent, en Asie du Sud-Est, mais les résultats sont généralement décevants.

Tu vis dans une ville multiculturelle, multi-langues. Est-ce que ça donne encore plus envie de voyager ?

Oui, car le voyage n’est jamais vraiment loin, à Montréal. Des dizaines et dizaines de communautés culturelles cohabitent ici. Il devient alors facile d’en apprendre plus sur un pays, au hasard d’une conversation. Par exemple, une représentante bancaire d’origine ukrainienne m’a parlé de son pays et de sa ville natale, Lviv, alors que j’étais là-bas pour effectuer une banale transaction. Ce genre d’interaction peut arriver très facilement ici et j’adore ça. On entend aussi de nombreuses langues dans les rues; ainsi, dans le quartier où j’habite, j’entends souvent des conversations en espagnol. Par ailleurs, cette diversité se reflète également dans les cuisines proposées dans les restaurants: indienne, éthiopienne, tibétaine, colombienne, afghane, française, coréenne, portugaise, vietnamienne, salvadorienne, sri lankaise, polonaise, caribéenne, japonaise, scandinave, etc. Il y en a pour tous les goûts, littéralement.

C’est quoi la liberté pour toi ?

Construire ses rêves et les réaliser. Préférer l’action aux excuses. Voyager seul.

Les prochaines destinations qui te font envie ?

Oh l’impossible question. Il y en a tant… mais bon, sans trop réfléchir, je dirais l’Argentine, la Bolivie, l’Équateur, le Brésil, le Portugal, le Sénégal, l’Afrique du Sud, le Malawi, l’Éthiopie, l’Albanie, le Monténégro, la Serbie, la Hongrie, l’Ouzbékistan, la Jordanie, Oman, la Birmanie, les Philippines, le Timor oriental, la Nouvelle-Calédonie et des dizaines d’autres.

sSoirée de quilles à Vientiane, Laos (photo prise par Isabelle Chauveau)

Tu imagines ta vie comment dans 10 ans ?

Je l’imagine avec un sac à dos, une passion, des voyages. Et des projets d’écriture.

Ton blog La Page à Pageau est très riche, intéressant et bien écrit. Peux-tu nous le présenter et nous dire comment tu trouves encore de l’intérêt et des sujets après 6 ans à bloguer ?

Merci ! J’ai lancé La page à Pageau en octobre 2007, au moment où j’allais faire un stage de quatre mois au Venezuela. Je voulais d’abord raconter ce voyage à mes proches, sans les harceler avec d’innombrables courriels. Puis, une fois là-bas, j’ai réalisé que j’aimais m’occuper du blogue. Donc, à mon retour, j’ai continué à écrire. À ce moment-là, je n’avais toutefois pas encore une vision claire de l’orientation que je voulais donner à mon blogue, mais je l’ai précisée avec le temps. Aujourd’hui, j’écris sur mes voyages, de même que sur toutes sortes de sujets liés au monde des voyages, en prenant soin d’y ajouter des informations utiles pour mes lectrices et lecteurs.

Pour ce qui est de l’intérêt, le secret, c’est tout simplement la passion des voyages. Voilà ce qui me pousse à écrire encore, ce qui me permet de trouver des sujets. Maintenant, de plus en plus, j’essaie de créer des liens avec d’autres blogueuses et blogueurs, afin que l’écriture soit aussi un pont vers des personnes qui partagent mes passions, et pas seulement un acte solitaire derrière un écran.

Merci Stéphane pour cet interview ! Allez vite découvrir La Page à Pageau si vous ne connaissez pas encore !

Cet article a 6 commentaires

  1. Petitgris

    Son expérience réussie lui donne envie d’autres évasions….mais il semble envisager les contacts tout en préservant sa solitude ! Son avis sur le Vietnam me sidère….l’évolution du climat social ne semble pas se faire dans le bon sens là-bas ! Bon 1er mai bises

  2. Sympa son interview, et c’est ironique la Belgique dans les pays qu’il a kiffé ? car rien a voir avec sa liste ! Marrant de voir qu’un Québécois est attaché à sa poutine comme un Français à sa charcuterie, son fromage et son pain!

  3. Bonjour Petitgris,

    Oui, j’ai encore envie de longs voyages, ils sont tellement instructifs, satisfaisants. Et, en effet, j’aime voyager seul, car j’ai alors toute la liberté de faire ce que je veux. J’aime beaucoup rencontrer des gens aussi, alors j’essaie de trouver un équilibre entre la solitude et les moments plus sociaux.

    Quant au Vietnam, j’ai connu des gens qui avaient adoré Hanoi et le pays, alors je crois que l’appréciation d’un endroit dépend beaucoup de la qualité des expériences qu’on y a vécues. C’est pourquoi les gens ne devraient pas s’empêcher de visiter un lieu simplement parce qu’ils en ont entendu des commentaires négatifs. Mon expérience du Vietnam a été éprouvante par moments, oui, mais ça ne veut pas dire que ce sera le cas pour tout le monde.

    Je te souhaite des voyages, des voyages et des voyages,

    Stéphane

  4. Sylvie

    Merci encore, Stéphane, pour cette interview.
    J’ai malheureusement eu une expérience similaires des taxis à Hanoï.

  5. Sylvie

    Non, je ne crois pas que ce soit ironique, c’est juste une question de rencontres de voyage !
    Ah, tu as raison, en voyage je rêvais de baguette, saucisson et fromage accompagnés d’un verre de bon vin 🙂 !

  6. Sylvie

    Merci Petitgris pour ton commentaire. Stéphane t’a répondu un peu plus bas. Bises.

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